À 30 ans passés, Yaya Bey s’impose comme l’une des figures les plus originales de la scène soul contemporaine. Militante, auteure, compositrice et performeuse, elle vient de sortir Do It Again, un nouvel album dense, collaboratif et introspectif.
Née Hidaiyah Bey, l’artiste américaine est difficile à catégoriser. Depuis son premier album en 2016, cette native de New York – aujourd’hui installée à Washington – construit une œuvre singulière mêlant musique, poésie, arts visuels et engagement politique. Avec Do It Again, son sixième album studio sorti le 20 juin 2025, elle poursuit sa quête d’une expression libre, mêlant soul, R’n’B, jazz et hip-hop, en collaboration avec les groupes BADBADNOTGOOD et Butcher Brown.
Derrière ses sonorités chaleureuses et son groove caractéristique se cache un parcours marqué par la résilience. Fille du rappeur Grand Daddy I.U, membre du célèbre collectif Juice Crew, Yaya Bey n’a pourtant reçu aucun soutien dans sa vocation musicale.
Mon père me disait que je n’y arriverais jamais
confie-t-elle.
Une opposition qui forge sa détermination et l’oriente très tôt vers l’activisme et l’écriture.
Militante pour les droits des femmes et de la communauté afro-américaine, elle manifeste régulièrement dans les rues de Washington. Ses textes, très personnels, évoquent autant les traumatismes de l’enfance que l’addiction à l’amour, les relations familiales ou la violence systémique. Une esthétique intime qu’on retrouve dans ses précédents projets salués par la critique, notamment Remember Your North Star (2022) et Exodus the North Star (2023).
Le deuil a marqué la création de son précédent album, Ten Fold (2024), conçu dans les mois suivant la mort de son père.
J’écrivais pour ne pas sombrer
explique-t-elle.
Do It Again, en revanche, se veut plus ouvert, tourné vers les autres. L’artiste y célèbre la capacité à « embrasser la vie telle qu’elle vient » et à « trouver la paix dans le pouvoir des relations humaines ».
Au-delà de la musique, Yaya Bey est aussi une artiste visuelle accomplie. Elle a exposé ses collages dans plusieurs galeries new-yorkaises et a été accueillie en résidence par le Museum of Contemporary African Diasporan Arts (MoCADA). Elle conçoit elle-même ses pochettes, ses vêtements de scène, ses clips. Une autonomie artistique revendiquée, à l’image de son parcours.
Figure montante d’une soul afro-féministe, Yaya Bey refuse les étiquettes. « Je veux que ma musique ressemble à ma vie : un mélange de colère et d’amour, de beauté et de chaos », résume-t-elle. Un équilibre fragile, mais d’une rare intensité.