Jusqu’au 15 septembre 2025, la Collection Peggy Guggenheim consacre une exposition majeure à l’artiste Maria Helena Vieira da Silva. Entre abstraction et figuration, un voyage vertigineux au cœur des labyrinthes visuels d’une pionnière de l’art moderne.
Elle a fait de la toile un territoire mental, un espace où se brouillent les lignes du réel. Maria Helena Vieira da Silva, figure majeure de la peinture du XXe siècle, s’invite à la Collection Peggy Guggenheim avec Anatomy of Space, une exposition ambitieuse qui explore, à travers près de 70 œuvres, l’évolution singulière de cette artiste née à Lisbonne et naturalisée française.
Le parcours, conçu par la commissaire Flavia Frigeri (National Portrait Gallery, Londres), propose une lecture inédite de l’œuvre de Vieira da Silva, trop souvent cantonnée à une abstraction austère. Or ici, tout est mouvement, tension, résonance. De ses premières compositions influencées par le cubisme et le futurisme aux grandes toiles labyrinthiques des années 1950 à 1980, l’artiste déploie un langage visuel profondément original, nourri de références architecturales, littéraires et urbaines.

Un art de l’entre-deux
Ce qui frappe, c’est cette manière constante de naviguer entre abstraction et figuration. Dans les tableaux exposés — provenant du Centre Pompidou, du MoMA, du Guggenheim New York ou encore de la Tate Modern — les espaces semblent tantôt s’ouvrir sur des villes imaginaires, tantôt se refermer dans des salles sans issue, saturées de perspectives impossibles. Vieira da Silva ne peint pas des lieux ; elle peint l’idée même d’un lieu, sa mémoire, sa vibration.
L’exil, Paris, et l’avant-garde
Née en 1908 à Lisbonne, Vieira da Silva arrive à Paris à la fin des années 1920. Elle y fréquente les grands ateliers, s’immerge dans l’avant-garde. Mais la guerre la pousse à l’exil : en 1940, elle fuit l’Europe avec son mari, le peintre hongrois Árpád Szenès, pour s’installer à Rio de Janeiro. Cet exil sera déterminant. Dans ses œuvres, la perte de repères devient une matière picturale.
L’exposition rappelle aussi les liens tissés par Vieira da Silva avec deux figures-clés du mécénat artistique : Peggy Guggenheim, qui l’expose dès 1943 à New York, et Hilla Rebay, première directrice du Museum of Non-Objective Painting, qui achète l’une de ses œuvres en 1937, marquant le début d’une reconnaissance internationale.
Un héritage à redécouvrir
Peu médiatisée en comparaison de ses contemporains masculins, Vieira da Silva retrouve aujourd’hui la place qui lui revient. Anatomy of Space s’inscrit dans cette dynamique de redécouverte et de réévaluation des artistes femmes du XXe siècle.
Après Venise, l’exposition voyagera à Bilbao, au Guggenheim Museum, à partir du 15 octobre. Une nouvelle étape pour une œuvre qui, loin d’avoir livré tous ses secrets, continue de fasciner par son intensité et sa rigueur.
Maria Helena Vieira da Silva: Anatomy of Space, jusqu’au 15 septembre 2025, Collection Peggy Guggenheim, Venise. Puis au Guggenheim Museum Bilbao du 15 octobre 2025 au 22 février 2026. Plus de renseignements sur guggenheim-venice.it