Discret mais incontournable, Félix Moati s’impose depuis quelques années comme une figure singulière du cinéma français. À 34 ans, l’acteur, également réalisateur, enchaîne les rôles sensibles et les projets audacieux, entre films d’auteur, drames intimistes et expériences plus internationales. Actuellement à l’affiche de Mikado, il confirme son goût pour les personnages complexes et les récits à fleur de peau.
Il y a dans le parcours de Félix Moati une constance rare : celle de ne jamais céder à la facilité. Depuis ses débuts remarqués dans LOL (2008), film générationnel à succès, l’acteur a su prendre ses distances avec les projecteurs trop éclatants pour cultiver une filmographie exigeante, faite de rôles en demi-teinte et de collaborations avec des cinéastes sensibles aux fêlures de l’âme humaine. Dans Hippocrate (2014), Gaspard va au mariage (2017), ou plus récemment Les Goûts et les Couleurs (2022), il incarne des personnages souvent en déséquilibre, porteurs d’une émotion fragile mais profonde.
Son style, c’est celui d’un jeu intérieur, sans effets ni posture. Une manière d’exister à l’écran par la tension, le silence, parfois même la maladresse. Dans Mikado, réalisé par Baya Kasmi, il campe un père nomade, tiraillé entre amour parental et désir de liberté. Le film explore avec pudeur les contours mouvants de la paternité contemporaine, entre responsabilités et lâcher-prise. Une thématique qui fait écho à ses propres préoccupations d’homme et de père, lui qui, déjà dans son premier long-métrage en tant que réalisateur (Deux Fils, 2019), abordait la question des liens familiaux avec une délicatesse rare.
Felix Moati appartient à cette génération d’acteurs qui redessinent les contours de la masculinité à l’écran. Loin des archétypes virils, il incarne une forme de masculinité douce, introspective, parfois inquiète — une fragilité assumée qui résonne particulièrement dans une époque en quête de nouveaux récits. Cette approche lui permet d’investir aussi bien le champ du cinéma social que celui de la comédie poétique, en passant par le drame psychologique.
Sa carrière ne se limite pas à la France. En 2021, il figure au casting de The French Dispatch, film choral du réalisateur américain Wes Anderson. Une expérience courte mais marquante, qui témoigne de l’ouverture de Moati à d’autres formes de narration, et de son intérêt pour les univers esthétiques forts.
Acteur, mais aussi scénariste et réalisateur, il travaille aujourd’hui à l’écriture de son deuxième long-métrage, avec l’exigence de ceux pour qui le cinéma est un engagement personnel autant qu’un art collectif. Loin des logiques de visibilité à tout prix, Félix Moati trace sa route avec sincérité, fidèle à une certaine idée du cinéma d’auteur français — un cinéma qui écoute plus qu’il ne crie, qui regarde plus qu’il ne démontre.